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Développement des communautés minières: Une réflexion plus large Blog

1 mars, 2019

Contexte

Les mines et les collectivités ne se choisissent pas mutuellement. La géologie et la viabilité commerciale déterminent de façon impartiale l’emplacement des mines, sans tenir compte de la présence ou de la capacité des collectivités locales. Et si les mines ne choisissent pas leurs communautés, celles-ci donnent effectivement leur consentement (consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause) mais n’ont pas le choix de l’entreprise elle-même. Souvent éloignées et appauvries, les collectivités qui sont sur place lorsqu’une mine s’implante sont rarement en mesure de profiter de ce nouveau potentiel économique. Elles manquent généralement de formation, de petites et moyennes entreprises (PME), d’infrastructures de base et de financement. Bien que les sociétés minières puissent combler certains de ces problèmes en soutenant directement la population, leur soutien est généralement considéré comme insuffisant.

L’expérience que nous avons acquise par le biais de trois projets publics-privés de rendement social nous a appris à relever ce genre de défis. En appliquant, avec nos partenaires commerciaux, des solutions systémiques régionales avec des partenaires du domaine du développement, nous avons obtenu de meilleurs résultats que ceux que nous aurions pu avoir avec le même budget si nous avions adopté une vision plus étroite. En matière de formation professionnelle, d’approvisionnement en eau et d’énergies renouvelables au Mali et au Burkina Faso, nous avons établi certains principes fondamentaux pour amener une réflexion plus large sur l’amélioration du bien-être des communautés.

Défis courants

Les mines sont souvent établies dans les régions les plus éloignées et mal desservies d’un pays – au Mali, par exemple, une grande partie du secteur aurifère est centrée autour de Kéniéba, une région isolée à la frontière avec le Burkina Faso et le Sénégal. Ces populations dépendent généralement d’une agriculture de subsistance, avec un accès limité aux services publics (p. ex. en santé et en éducation) et des possibilités économiques restreintes. La construction d’une mine peut donc soulever les aspirations économiques et les attentes en matière de services. La perspective de l’exploitation de métaux précieux (p. ex. l’or au Mali) et des perturbations connexes peuvent encore augmenter les attentes des communautés, qui ont un sentiment de propriété par rapport à la terre mais aussi aux minerais.

Même si une mine met en place des services sociaux proportionnels à la taille de la population avant sa construction, celle-ci peut aussi amener un afflux significatif de migrants. La grandeur d’une ville peut quadrupler après la construction d’une mine. Ce fut le cas de Fungurume, dans la ceinture de cuivre congolaise, qui est passée de 30 000 habitants en 2005 à plus de 100 000 en 2015. Une mauvaise récolte, l’insécurité ou la promesse d’un emploi suffisent pour qu’une famille aille s’installer dans une ville minière. De plus, des mineurs artisanaux peuvent être attirés par la perspective de gisements miniers exposés. Cependant, comme plusieurs le découvrent, une mine ne crée généralement que quelques milliers d’emplois qualifiés, pour lesquels les gens de la région ne sont pas adéquatement qualifiés. Cet environnement social dynamique représente un défi en matière d’investissements sociaux. Plus une ville devient attirante pour les migrants, plus il faut d’écoles et de cliniques. Les budgets de rendement social, gérés par la compagnie ou par la communauté, ne peuvent pas évoluer en fonction des besoins, surtout pendant la phase de construction et les années suivantes, quand les mines fonctionnent à perte.

Les solutions économiques peuvent donc être plus intéressantes. L’augmentation des revenus des membres de la collectivité peut financer durablement des améliorations dont bénéficie la communauté. L’approvisionnement local a suscité beaucoup d’attention dans les dernières années, car une mine consacre habituellement de 50 à 65 % de son budget à des dépenses de fonctionnement et d’immobilisations. Cela représente des centaines de millions de dollars en approvisionnement dans des pays comme le Mali.

Mais l’approvisionnement local présente des défis de taille. Il arrive souvent que les entreprises locales n’aient pas la capacité de fournir la quantité de biens et de services requis ni de satisfaire les normes et les délais imposés. On ne doit pas non plus surestimer le potentiel que représentent les achats locaux. Une étude sur l’approvisionnement minier réalisée par le BGR (institut fédéral allemand pour les géosciences et les ressources naturelles) a révélé qu’en 2017, 40 % des 529 millions USD dépensés par le Mali ont servi à acheter du carburant pour produire de l’électricité[1]. Les réactifs, les explosifs, les lubrifiants, les pièces de rechange et le matériel de broyage représentaient 55 % des dépenses. En fait, peu de dépenses sont investies dans la communauté locale, par exemple dans les services de restauration ou de transport.

Penser plus largement

Les défis du développement communautaire exigent qu’on adopte une approche intégrée et durable, qui reconnaît à la fois l’ampleur de la tâche et les limites des moyens disponibles. Cowater a travaillé au Mali et au Burkina Faso pour concevoir et mettre en œuvre des solutions systémiques visant à favoriser le développement communautaire dans le secteur aurifère. Ce faisant, nous avons établi quatre façons de penser différemment pour améliorer le bien-être des communautés.

Penser de façon systémique

On ne peut pas réaliser de développement économique durable si on se concentre étroitement sur une seule composante. Cette approche est souvent utilisée en développement international, dans des programmes de création de systèmes de marché et de chaînes de valeur. Par exemple, pour augmenter la productivité agricole, il faut que les agriculteurs puissent s’approvisionner auprès de fournisseurs commerciaux, qu’ils aient accès à du financement pour ces achats et qu’ils vendent aux acheteurs à un prix équitable. Notre expérience a démontré que les gouvernements ont leur rôle à jouer, tant localement que nationalement, en élaborant la réglementation et en délivrant les accréditations nécessaires.

Dans le cadre de notre projet AFECK, au Mali, nous formons des jeunes de la région de Kéniéba en leur enseignant des compétences techniques, mais nous travaillons aussi à ce que le gouvernement certifie leurs compétences, pour permettre à la mine de leur offrir des emplois et aux PME locales de développer leur talent entrepreneurial. Cofinancé par B2Gold et Affaires mondiales Canada, ce projet a permis à 767 jeunes de la région d’être formés en 2018, et 52 % d’entre eux ont trouvé un emploi dans les mois suivants.

Penser de façon commerciale

La pauvreté ne freine pas l’esprit d’entreprise, et le développement économique exige des modèles d’affaires durables. Les sociétés minières doivent trouver des partenaires commerciaux pour répondre aux besoins des collectivités. Ces sociétés peuvent fournir des emplois et des services qui constitueront la base de la prospérité de la collectivité à long terme.

Les partenariats avec de petites et grandes entreprises d’autres domaines peuvent se faire par le biais de l’activité principale de la mine et de son programme de durabilité. En matière d’approvisionnement local auprès de petits exploitants agricoles, il est possible d’établir des programmes d’aide aux petits exploitants avec les producteurs et les transformateurs agricoles, afin de s’assurer que les agriculteurs reçoivent un soutien commercialement viable. Dans de tels cas, la société minière détermine les exigences envers ses fournisseurs et soutient la collaboration, en investissant du capital au besoin. La mine peut aussi soutenir des entreprises qui ne sont pas incluses dans sa chaîne d’approvisionnement, si la collectivité peut en bénéficier.

Dans le cadre de notre projet ECED Mouhoun, au Burkina Faso, nous travaillons avec des fournisseurs de lampes solaires pour étendre leurs activités dans des zones mal électrifiées. Le projet sensibilise les gens aux avantages des lampes solaires et offre aux détaillants de la région une petite subvention proportionnelle à leurs ventes. Les détaillants sont donc en mesure d’investir dans la région (magasins, équipes commerciales, équipes d’entretien), tandis que la collectivité bénéficie d’une source d’éclairage et d’électricité moins coûteuse et plus fiable. Le projet ECED Mouhoun, qui est cofinancé par Windiga Énergie, l’agence d’électrification rurale du Burkina Faso et Affaires mondiales Canada, vise à fournir de l’électricité à 18 000 Burkinabés des régions rurales grâce à ce modèle.

Penser de façon régionale

Un ciblage géographique trop étroit peut être nuisible et encourager la migration des communautés avoisinantes. Le développement communautaire doit donc avoir une large portée et chercher à résoudre les problèmes de toute la région entourant une mine. Les enjeux liés à l’accès à l’eau, à l’électricité, à la productivité agricole et aux transports ne s’arrêtent pas à la limite d’une concession minière. Il est possible d’atténuer la tendance migratoire, de résoudre les problèmes tout au long des couloirs de transport et d’obtenir le soutien des partenaires du secteur public.

Notre projet ECED Sahel, cofinancé par IAMGOLD, la Fondation One Drop et Affaires mondiales Canada, vise à construire une infrastructure d’eau potable pour 83 000 personnes vivant dans la région du Sahel, au Burkina Faso. Ceci fait en sorte que les communautés situées près de la mine ne sont pas les seules à bénéficier de l’exploitation. Le projet a aussi attiré des partenaires de cofinancement comme Affaires mondiales Canada et One Drop, et a produit des économies d’échelle durant sa mise en œuvre.

Penser de façon collaborative

Il est essentiel d’avoir une vision régionale pour mobiliser les partenaires. Au moment où les mines ont le moins d’argent à dépenser quand c’est le plus important (la phase de construction), elles sont aussi en bonne position pour obtenir des fonds auprès d’autres intervenants, qui partagent leurs objectifs de développement dans leurs domaines. Malgré les préoccupations liées aux partenariats public-privé, notamment en matière de réputation, les organisations donatrices (p. ex. le gouvernement du pays où se situe la mine et les agences multilatérales) ont un intérêt marqué pour le développement communautaire.

En investissant dans les routes et l’énergie et créant des opportunités économiques, les mines peuvent être considérées comme des acteurs de transformation par les agences de développement. Bien que celles-ci ne voient pas toutes le secteur d’un bon œil, certaines voient la possibilité d’unir les forces pour atteindre des objectifs plus ambitieux. Si les mines considèrent qu’elles récoltent des fonds publics, les agences donatrices, de leur côté, désirent bénéficier des fonds privés.

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Avec ses trente ans d’expérience en développement international, Cowater est fière de canaliser les aspirations de ses clients pour favoriser des partenariats qui profitent aux collectivités de façon systématique, durable et élargie. Notre travail se concentre sur l’autonomisation des communautés dans certaines des régions les plus reculées et les plus pauvres du monde, en appliquant des solutions durables et systémiques qui améliorent leur condition. Nous utilisons notre savoir-faire, basé sur trente ans de mise en œuvre de programmes ambitieux au nom d’agences de développement, pour relever les défis posés par le développement communautaire en zones minières.

Le projet ECED Sahel, notre programme d’approvisionnement en eau au Burkina Faso, a été conçu avec IAMGOLD et a reçu plus de 13 millions CAD d’Affaires mondiales Canada, et 2,25 millions CAD de la Fondation One Drop, la société IAMGOLD ayant elle-même versé 2,25 millions CAD. AFECK, notre projet de formation professionnelle au Mali, a été conçu avec B2Gold et a permis de recevoir 5,25 CAD du gouvernement canadien (B2Gold a investi 1,75 million CAD). ECED Mouhoun, notre projet portant sur l’énergie solaire, a été mené avec Windiga Énergie, qui en a financé la conception, et le programme a reçu près de 18 millions CAD d’Affaires mondiales Canada et de l’Agence d’électrification rurale du Burkina Faso.

En réfléchissant plus largement et en comprenant les ramifications et l’interdépendance des gestes de développement social, il est possible d’apporter des changements systémiques et durables dans les communautés minières.

 

[1]https://public.tableau.com/profile/extractivesanddevelopment#!/vizhome/ProcurementDemandModelWestAfrica/ProcurementDemandModelWestAfrica


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